Sumario 21

 

Catherine
Pozzi

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   Traducción de
   Carlos Cámara
   y Miguel Ángel Frontán

AVE

Très haut amour, s'il se peut que je meure
Sans avoir su d'où je vous possédais,
En quel soleil était votre demeure
En quel passé votre temps, en quelle heure
Je vous aimais,

Très haut amour qui passez la mémoire,
Feu sans foyer dont j'ai fait tout mon jour,
En quel destin vous traciez mon histoire,
En quel sommeil se voyait votre gloire,
Ô mon séjour.

Quand je serai pour moi—même perdue
Et divisée à l'abîme infini,
Infiniment, quand je serai rompue,
Quand le présent dont je suis revêtue
Aura trahi,

Par l'univers en mille corps brisée,
De mille instants non rassemblés encor,
De cendre aux cieux jusqu'au néant vannée,
Vous referez pour une étrange année
Un seul trésor

Vous referez mon nom et mon image
De mille corps emportés par le jour,
Vive unité sans nom et sans visage,
Cœur de l'esprit, ô centre du mirage
Très haut amour.

 

AVE

Muy alto amor, si acaso yo muriese
Sin saber nunca dónde te encontré,
En qué planeta estaba tu morada
Tu tiempo en qué pasado, en qué hora
Te amaba yo,

Muy alto amor que escapas al recuerdo,
Fuego sin foco que fue todo mi sol,
En qué sino trazabas mi existencia,
En qué sueño tu gloria se veía,
Oh mi aposento

Cuando para mí misma esté perdida
Y dividida en abismo infinito,
Cuando rota ya esté infinitamente,
Cuando sea traidor este presente
Que me reviste,

Quebrada por el mundo en mil fragmentos,
De mil instantes aún no reunidos,
De ceniza cernida hasta la nada,
Para un extraño tiempo harás de nuevo
Sólo un tesoro


De nuevo harás mi imagen y mi nombre
Con mil cuerpos robados por el día,
Viva unidad sin nombre y sin figura,
Centro del alma, raíz del espejismo
Muy alto amor.

 

VALE

La grande amour que vous m'aviez donnée
Le vent des jours a rompu ses rayons —
Où fut la flamme, où fut la destinée
Où nous étions, où par la main serrée
            Nous nous tenions

Notre soleil, dont l'ardeur fut pensée
L'orbe pour nous de l'être sans second
Le second ciel d'une âme divisée
            Le double exil où le double se fond

Son lieu pour vous apparaît cendre et crainte,
Vos yeux vers lui ne l'ont pas reconnu
L'astre enchanté qui portait hors d'atteinte
L'extrême instant de notre seule étreinte
            Vers l'inconnu.

Mais le futur dont vous attendez vivre
Est moins présent que le bien disparu.
Toute vendange à la fin qu'il vous livre
Vous la boirez sans pouvoir être qu'ivre
            Du vin perdu.

J'ai retrouvé le céleste et sauvage
Le paradis où l'angoisse est désir.
Le haut passé qui grandi d'âge en âge
Il est mon corps et sera mon partage
            Après mourir.

Quand dans un corps ma délice oubliée
Où fut ton nom, prendra forme de cœur
Je revivrai notre grande journée,
Et cette amour que je t'avais donnée
            Pour la douleur.

 

VALE

Del gran amor que tú me habías dado
El viento de los días los rayos destrozó —
Donde estuvo la llama, donde estuvo el destino
Donde estuvimos, donde, las manos enlazadas,
            Juntos estábamos

Sol que fue nuestro, de ardiente pensamiento
Para nosotros orbe del ser sin semejante
Segundo cielo de un alma dividida
            Exilio doble donde el doble se funde

Ceniza y miedo para ti representa
Su lugar, tus ojos no lo han reconocido
Astro encantado que con él se llevaba
De nuestro solo abrazo el alto instante
            Hacia lo ignoto.

Pero el futuro del que vivir esperas
Menos presente está que el bien ausente
Toda vendimia que él al final te entregue
La beberás mientras te embriaga el
            Vino perdido..

Volví a encontrar lo celeste y salvaje
El paraíso en que angustia es deseo
Alto pasado que con el tiempo crece
Es hoy mi cuerpo, mi posesión será
            Tras el morir.

Cuando en un cuerpo mi delicia olvidada
En que estuvo tu nombre se vuelva corazón
Reviviré los días que fueron nuestro día
Y aquel amor que yo te había dado
            Para el dolor.

 

ESCOPOLAMINE

Le vin qui coule dans ma veine
A noyé mon cœur et l'entraîne
Et je naviguerai le ciel
À bord d'un cœur sans capitaine
Où l'oubli fond comme du miel.

Mon cœur est un astre apparu
Qui nage au divin nonpareil.
Dérive, étrange devenu !
Ô voyage vers le soleil —
Un son nouvel et continu
Est la trame de ton sommeil.

Mon cœur a quitté mon histoire
Adieu Forme je ne sens plus
Je suis sauvé je suis perdu
Je me cherche dans l'inconnu
Un nom libre de la mémoire.

 

ESCOPOLAMINA

El vino que por mis venas fluye
Ahogó mi corazón y se lo lleva
Y por el cielo yo navegaré
En un corazón sin capitán
Donde el olvido es blanda miel.

Mi corazón es astro aparecido,
Que nada en el divino sinigual.
¡Deriva, extraño acontecido!
Oh viaje, largo viaje hacia la luz—
Sonido nuevo y nunca interrumpido
Es la tejida trama de tu sueño.

Mi corazón abandonó mi historia
Adiós Forma ya no siento más
Estoy a salvo al fin estoy perdido
Me voy buscando en lo desconocido
Un nombre libre de la memoria.

 

NOVA

Dans un monde au futur du temps où j'ai la vie
Qui ne s'est pas formé dans le ciel d'aujourd'hui,
Au plus nouvel espace où le vouloir dévie
Au plus nouveau moment de l'astre que je fuis
Tu vivras, ma splendeur, mon malheur, ma survie
Mon plus extrême cœur fait du sang que je suis,
Mon souffle, mon toucher, mon regard, mon envie,
Mon plus terrestre bien perdu pour l'infini.

Évite l'avenir, Image poursuivie !
Je suis morte de vous, ô mes actes chéris
Ne sois pas défais toi dissipe toi délie
Dénonce le désir que je n'ai pas choisi.

N'accomplis pas mon jour, âme de ma folie, —
Délaisse le destin que je n'ai pas fini.

 

NOVA

En un mundo futuro en que tengo la vida
Que no llegó a formarse en el cielo de hoy,
En el flamante espacio adonde va el querer
En el virgen momento del astro que rehuyo
Vivirás, mi esplendor, mi salvación, mi pena
Mi extremo corazón con mi sangre formado,
Mi mirada, mi aliento, mi tacto, mi deseo,
Mi más terrestre bien para el azul perdido.

¡Elude el porvenir, Imagen perseguida!
De vosotros he muerto, oh mis actos queridos
Deshácete disípate no aceptes ser desata
Denuncia ese deseo que yo nunca elegí.

No completes mi día, alma de mi locura,—
Abandona el destino que no llegué a cumplir.

 

MAYA

Je descends les degrés de siècles et de sable
Qui retournent à vous l'instant désespéré
Terre des temples d'or, j'entre dans votre fable
Atlantique adoré.

D'un corps qui ne m'est plus que fuie enfin la flamme
L'Âme est un nom chéri détesté du destin —
Que s'arrête le temps, que s'affaisse la trame,
Je reviens sur mes pas vers l'abîme enfantin.

Les oiseaux sur le vent dans l'ouest marin s'engagent,
Il faut voler, bonheur, à l'ancien été
Tout endormi profond où cesse le rivage
Rochers, le chant, le roi, l'arbre longtemps bercé,
Astres longtemps liés à mon premier visage,

Singulier soleil de calme couronné.

 

MAYA

Desciendo los peldaños de siglos y de arena
Que el instante angustiado conducen hacia ti
Tierra de templos de oro, en tu fábula entro
Atlántico adorado.

De un cuerpo ya no mío que la llama rehuye
Caro nombre es el Alma, que detesta el destino —
Que se detenga el tiempo, que se hunda la trama,
Sobre mis pasos vuelvo al abismo infantil.

En el viento los pájaros hacia el marino oeste
Vuelan, hay que volar, dicha, al verano antiguo
Sumido en sueño allí donde cesa la orilla
Rocas, el canto, el rey, árbol que el viento mece,
Astros de antiguo unidos a mi rostro primero,

Extraordinario sol de calma coronado.

 

NYX

A Louise aussi de Lyon et d'Italie

Ô mes nuits, ô noires attendues
Ô pays fier, ô secrets obstinés
Ô longs regards, ô foudroyantes nues
Ô vol permis outre les cieux fermés.

Ô grand désir, ô surprise épandue
Ô beau parcours de l'esprit enchanté
Ô pire mal, ô grâce descendue
Ô porte ouverte où nul n'avait passé

Je ne sais pas pourquoi je meurs et noie
Avant d'entrer à l'éternel séjour.
Je ne sais pas de qui je suis la proie.
Je ne sais pas de qui je suis l'amour.

 

NYX

A Louise también de Lyón y de Italia

Oh noches mías, oh sombras esperadas
Oh tierra altiva, oh secretos tenaces
Oh lentos ojos, oh nubes fulminantes
Oh vuelo libre más allá de los cielos.

Oh gran afán, oh expandida sorpresa
Oh bella marcha del alma embelesada
Oh mal supremo, oh gracia descendida
Oh puerta abierta por la que nadie entró

No sé por qué me muero yo y me ahogo
Antes de entrar en la eterna morada.
Cómo saber de quién yo soy la presa.
Cómo saber de quién soy el amor.

 

 

© Catherine Pozzi
Traducción de Carlos Cámara y Miguel Ángel Frontán

Catherine Pozzi. Colección privada, París

 

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